19 septembre 2007

Documenta 12 (Kassel )




Une 12 ème édition très critiquée. Mais à mon avis, il en va des Dokumenta comme des Woody Allen, même faible, cela reste largement au dessus de la moyenne. Par provocation, je pourrais aussi dire que le pélerinage tous les 5 ans, se justifie par la seule présence des Rembrandt et des Franz Hals du château de Wilhelmshöhe. En plus il y avait une superbe exposition de peintres flamands avec un portrait d'Elisabeth Tudor par Dürer à se damner. Mais pour en revenir à notre époque, quelques artistes méritent à mon sens à eux seuls le détour, après tant pis pour certaines maladresses d'exposition ou choix moins heureux :

Ai Weiwei, artiste architecte chinois.

Pour la sculpture "Templates" réalisée pour l'occasion, il a assemblé des portes des dynasties Ming arrachées lors de la construction de nouveaux buildings à Pékin pour en faire une espèce de rose des vents. Et ironie du sort pour quelqu'un qui justement dit que ses idées vont et viennent comme le vent; la sculpture a été détruite par une bourrasque quelques jours après l'inauguration. Weiwei a choisi néanmoins de la laisser en l'état, et l'oeuvre fascine encore car on y sent les energies : celle de l'artiste et celle du vent ... qui par son intervention a contribué à la renommée de l'oeuvre et en a doublé le prix :o)
Pour "Fairly Tails", c'est une idée simple : il a invité 1001 chinois qui n'avaient jamais eu l'opportunité de voyager, et à qui ce ne serait même pas venu à l'idée de pouvoir se rendre en Allemangne, à venir et rester une semaine à Kassel, tous frais payés. Ensuite ils doivent lui faire part de leurs impressions et intérets et enregistrer les photos sur une clé USB, mise en ligne par la suite sur un blog. Il a du selectionner les participants car en 3 jours il avait déjà recu 3000 réponses à son annonce ! Voilà le principe n'est pas nouveau , c'est un peu "Les lettres persannes" au XXI ème siècle, c'est utile de nous rappeler que le regard de l'étranger de l'autre, est nécessaire pour nous sortir de nos habitudes , de notre routine et nous rendre plus intelligent.

Trisha Brown (US), grande dame de la danse contemporaine depuis les années 70.
Elle réalise ici plusieurs pièces dont l'installation et la chorégraphie "Floor of the forest" : enthousiasmant ! Gestes simples, corps qui défient la gravité en ondulant sur une mer de cordages et de vêtements. Scène horizontale qui vibre. D'accessoire chorégraphique, le "cordage" devient après le départ des danseurs une sculpture , comme un filet de pêche qui du fait des vêtements , garde la mémoire des corps, nous renvoyant ainsi à la conscience du caractère ephèmere de notre condition. Du fait de la grande simplicité des moyens mis en oeuvre (tant au niveau de la chorégraphie que de la scénographie ). Barthes qualifiait les mises en scéne de Trisha Brown comme relevant de la plus parfaite "vénusté" traduisant aussi la séduction pure qui s'en dégage.
(Je regrette d'ailleurs d'avoir manqué le spéctacle donné par Yvonne Rainer, donc si certains d'entre vous y ont assisté, je veux bien des détails ou des photos.)

Charlotte Posenenenske, designer, artiste et sociologue allemande.
Cette artiste reprendra à son compte les concepts minimalistes américains mais avec une sensibilité européenne, notamment du fait de ses questions sur l'illusionisme. "Je suis intéressée par la tension qui est crée entre la réalité de la tridimensionalité du support et l'illusion de tridimensionnalité de la peinture." Comme les artistes des années 60, Posenenske était fascinée par la technologie, l'industrie et la production à grande échelle. Ses oeuvres seront essentiellement réalisées à partir de matériaux industriels : , plastique, scotch, feuille d'aluminium etc. Sa grande préoccupation sera aussi de refuser les relations hierachiques entre les élements d'une composition, ... la fonction sociale de l'art n'est jamais très loin. Elle réalisa de nombreux dessins, vidéos et introduit dans les années 60 une dimension participative à ses sculpltures. Mais en 1968 , trouvant l'art trop insuffisant à changer le monde elle arrêta sa carrière d'artiste pour se consacrer à la sociologie. Elle est décèdée en 1985 à Franckfort.
Tout cela ne pourrait être que théorique et barbant , si ce n'est qu'à regarder ses oeuvres datant des années 60 : on est frappés par l'élégance de leur proportions et finalement leur grande modernité. A côté, je trouve que les oeuvres récentes de John Mac Craken font très toc bref je n'ai pas compris son apport par rapport à Judd ou Posenenske.